Qui connaît ce sentiment, celui de sentir complètement inutile ? De sentir que nous ne sommes pas à notre place dans ce monde ? Bizarrement, en discutant avec les gens, je me rends compte que finalement, il s’agit de ressentis relativement répandus. Et pour quelles raisons ?
Je crois que les valeurs auxquelles nous tenons, de manière personnelle, je veux dire, ne sont pas forcément alignées avec les valeurs que le monde – ou plutôt les médias, les réseaux sociaux et compagnie – nous renvoient. D’où un fort sentiment de décalage.
Quiconque a vécu une expérience intense de maladie, pour lui-même, pour un membre de sa famille, prend conscience que la santé est inestimable, qu’il s’agit d’un trésor précieux qu’il s’agit de conserver autant que possible. Que la non-douleur est un cadeau, une île paradisiaque perdue au milieu de vagues dévastatrices.
En essayant de devenir autonome dans la vie, de grandir, de s’émanciper, nous nous rendons compte que l’indépendance est un leurre, que nous ne pouvons juste pas nous en sortir seuls. Nous avons besoin des autres, nous avons parfois besoin d’aide… Par conséquent, il y a d’autres personnes qui parfois ont besoin de nous. Il faut bien l’accepter.
En parlant d’indépendance, nous avons tous nos chaînes, nos boulets, des responsabilités, des pressions sociales, dont nous n’avons pas le choix de tenir compte lors de nos décisions importantes. La liberté ? Pas facile… à moins de comprendre que le fait d’être bien avec nos choix, de savoir pour quelles raisons nous les faisons, nous en apporte déjà un gros morceau. Que la frustration est un apprentissage et une nécessité, que son absence amène à une restrictions de liberté.
Et bien sûr, l’amour, l’amitié, sont des valeurs universelles – j’espère ! L’amour, le plus grand des pouvoirs, qui relie tout, qui nous fait vivre les expériences les plus intenses.
Jusque-là, je pense qu’une majorité de personnes me suivent ; ces valeurs sont bien basiques et apparemment bien conscientisées par tout cerveau humain. Mais alors, pourquoi n’arrivons-nous pas à nous accorder ?
Si l’argent gouverne le monde, qu’apporte-t-il en vrai ? Car une fois nos besoins vitaux assouvis, une fois le confort souhaité obtenu, pourquoi vouloir amasser toujours plus ? Ce que je soupçonne, c’est ce désir incontrôlable de reconnaissance, de vouloir montrer qui nous sommes, ce que nous valons (ou croyons valoir), et tout cela doit passer par l’apparence. Les objectifs et le bien-être communautaires ont fait place aux objectifs et bien-être individuels, quitte à casser quelques personnes au passage. Et lorsque notre pyramide de Maslow s’effondre, nous nous retrouvons alors avec ce besoin primaire de quelqu’un pour nous aider…
En même temps, nous sommes continuellement dispersés. Au JO, des matchs ont été interrompus par le record de Jean Marchand. Génial, parce que quelque chose d’important était certes en train de se produire, mais déprimant… car les personnes assistant à un match olympiques n’étaient pas présents… à demi sur leurs smartphones en train de suivre d’autres actualités. Si nous ne parvenons plus à rester sur une seule chose et d’en profiter pleinement, peut-être que nous ne nous sentons jamais pleinement heureux.
J’ai une vie de bisounours ; je crois – encore – à l’être humain, ou plutôt à l’humanité, en espérant qu’un jour, nous puissions vivre en communion avec notre planète-mère. Nous sommes complémentaires, pas adversaires. Les différences représentent une grande richesse et la vraie liberté. Huit milliards d’être totalement différents, c’est une chance, une bénédiction. Peu importe de savoir ce que l’autre mange, peu importe de montrer sa nouvelle coupe de cheveux, peu importe de partager le nombre de kilos perdus ou de se faire un selfie avec sa nouvelle voiture.
Si nous faisions un peu confiance aux autres, l’esprit communautaire revivrait un peu et personne ne pourrait plus se sentir inutile et invisible… donc augmenterait la confiance en soi de chacun. Je suis humaine, mais je ne suis pas toujours au top. Je suis bisounours, mais je suis aussi buffle, parfois. Alors pourquoi croire que nous faisons des erreurs alors que nous ne faisons que vivre ? Ce sont nos expériences qui nous font évoluer. Et en écoutant celles des autres, nous apprenons, nous grandissons aussi. Partageons ce qui a vraiment du sens : tout le monde s’en trouvera grandi, et les liens entre les humains plus forts.